lundi 25 mai 2009

Jean-Baptiste Greuze, L’accordée de village, 1761, Paris, Musée du Louvre.


La peinture de la morale et du sentiment :
Jean-Baptiste GREUZE, L’accordée de village, 1761, Paris, Musée du Louvre.



Jean-Baptiste GREUZE, L’accordée de village, 1761, huile sur toile, 92x117 cm, Paris, Musée du Louvre.


Jean-Baptiste Greuze (1725 – 1805) voulait être peintre, contre l’avis de son père qui le voulu architecte.
Il fait son premier apprentissage chez le peintre Grandon, à Lyon, avant de s’installer à Paris vers 1750. Il s’intègre dès lors dans les cercles de collectionneurs. Tout en suivant les cours de l’Académie, il s’éloigne du chemin officiel qui l’aurait mené à concourir pour le Prix de Rome. Il fut cependant agréé en 1755 lorsqu’il présenta au Salon Père de famille qui lit la Bible à ses enfants.
Greuze peint des portraits, des peintures historiques mais il est principalement connu pour ses scènes de genre bien qu’il eut voulu être connu en tant que peintre d’histoire. Ambitionnant d’être reçu en tant que tel à l’Académie, il présenta Septime Sévère reproche à Caracalla d’avoir voulu l’assassiner en 1769. Mais ce fut un échec, l’Académie mettant en avant le fait qu’il peigne des histoires dans un cadre familial, ses œuvres étant dès lors des peintures de genre.
De nombreux collectionneurs s’intéressent à ses œuvres, dont le marquis de Marigny, frère de Mme de Pompadour, favorite du Roi Louis XV. Le marquis acquiert L’Accordée de village, et à la mort de celui-ci, l’œuvre est rachetée par le surintendant du Roi pour le Roi.
C’est en 1761 que Greuze présenta L’Accordée de village au Salon.

En quoi cette œuvre instaure-t-elle Greuze comme « peintre de mœurs » ?


Une scène rustique.
Un intérieur paysan.

La scène est une véritable galerie théâtrale où l’on décèle douze personnages. Une famille paysanne est réunie pour concrétiser le mariage d’une des filles de la famille.
Greuze réalisa plusieurs dessins préparatoires et des gravures qui permettent de nous faire découvrir l’évolution de la mise en place des personnages, notamment celle du personnage du fond, qui monte l’escalier, qui n’apparait qu’à mi-hauteur dans l’œuvre définitive.



J.-B. GREUZE, Etude pour la composition de L’Accordée de village, 1761, grisaille, Paris, Musée du Petit Palais.


Remarquons dès lors la composition en arc de cercle, où les personnages s’enchaînent les uns par rapport aux autres et permettent une lecture dans les deux sens. De même ceux-ci offrent un ensemble d’émotions et de sentiments.
Des thèmes très classiques apparaissent dans la composition des personnages, tels que la vieille femme vénérable et le jeune fiancé, le cadre du foyer.
Notons que les hommes agissent alors que les femmes sont passives, ce qui connote un devoir des hommes face aux sentiments des femmes.
Quelques éléments sont à remarquer dans la composition de l’intérieur, tels que la nature morte représentant une étagère qui porte les pains sur un linge blanc, le fusil, la lanterne, le groupe de poules, qui caractérisent un intérieur paysan.
Cependant c’est à peine si l’on voit la pièce dans laquelle se déroule l’évènement mais l’on peut remarquer une certaine aisance, malgré l’appartenance au monde paysan.


La promesse de mariage.
La scène représente donc un intérieur villageois, où l’on voit un père remettre solennellement à son futur gendre la dot de sa fille. Celui-ci écoute avec attention les propos du père. Le peintre explicite donc ici la cérémonie de la promesse de mariage au cours de laquelle le contrat est dressé devant notaire.
Le titre complet de l’œuvre est par ailleurs Un mariage, et l’instant où le père de l’accordée délivre la dot à son gendre.
Douze personnages sont représentés dans cette scène et sont chacun dans leur rôle. Diderot fait remarquer que la scène est peinte telle qu’elle a du se passer et que chacun fait alors ce qu’il doit.
La jeune fiancée, l’accordée, est émouvante par son attitude mais aussi par son expression de retenue et de douceur contenue dans la position de sa tête et ses yeux, pudiquement baissés. Elle passe un bras au-dessous de celui de son futur époux tout en effleurant la main de ce dernier qu’elle ne semble pas oser prendre. Son autre main est retenue par sa mère en larme, assise sur un fauteuil, voyant le bras de sa fille lui échapper et donc sans doute par extension, sa fille elle-même.
Cet acte officiel qui va bouleverser sa vie suscite, en effet, des réactions diverses parmi les témoins.
La sœur aînée de la fiancée, se trouvant derrière le père, visage appuyé sur une main, regarde la scène avec dépit, semblant être jalouse. Alors que la sœur cadette pleure sur l’épaule de sa sœur qu’elle va perdre et ne semble, au contraire, pouvoir cacher son chagrin.
Les plus jeunes de la fratrie semblent voient l’évènement à leur manière. Le plus jeune s’intéresse aux papiers du notaire posés sur la table alors que le cadet, par exemple se hausse sur la pointe des pieds pour mieux voir. La jeune fille donne du pain à une poule et aux poussins, symboles de la fertilité du mariage.
Le fiancé, fait deux choses en même temps : il reçoit la dot du père et l’écoute. Ce dernier, en effet, a la main tendu vers le fiancé afin de lui remettre la dot et fait un discours sans doute sur les obligations du mariage.
Le tabellion, notaire dans une seigneurie, se trouve au premier plan, dans un décor précisément planté. Il établit le contrat de mariage, tout en écoutant ce que dit le père.
L’originalité de la scène de Greuze se trouve dans le fait qu’il s’oppose aux images d’une Arcadie érotique et aux Pastorales de son temps, comme celles de Boucher. La relation amoureuse est ici attestée par une transaction pécuniaire. Le thème reflète l’organisation, l’ordonnance des personnages. Et cette morale imagée plut à Diderot : « Oh ! Que les mœurs simples sont belles et touchantes, et que l’esprit et la finesse sont peu de choses auprès d’elles ! ».
Il faut aussi faire une incursion dans la vie du peintre, qui a épousé une femme, le ruinant par ses dépenses et multipliait les amants. Sans doute, avec cette œuvre, Greuze rêva d’un idéal avec des épouses attentives et bonnes mères.
Cet idéal fut partagé par les foules et la critique, ajouté à cela une vie campagnarde vu comme idyllique prônée la seconde moitié du XVIIIè siècle.
Diderot, Salon de 1761 : « C'est un père qui vient de payer la dot de sa fille. […] Le peintre a donné à la fiancée une figure charmante, décente et réservée. […] Elle est jolie, vraiment. Une gorge faite au tour qu'on ne voit point du tout. Mais je gage qu'il n'y a rien là qui la relève, et que cela se tient tout seul. Plus à son fiancé, et elle n'eût pas été décente ; plus à sa mère ou à son père, et elle eût été fausse. Elle a le bras à demi passé sous celui de son futur époux, et le bout de ses doigts tombe et appuie doucement sur sa main ; c'est la seule marque de tendresse qu'elle lui donne, et peut-être sans le savoir elle-même. ».


Une peinture morale.
Diderot a laissé une foisonnante description de cette œuvre. Il détaille toutes es beautés du tableau tout en en faisant une description fidèle. Selon Diderot, l’attention prêtée aux moindres détails, l’évocation des nordiques du XVIIè siècle dépassent l’anecdote par la noblesse car les nombreux éléments narratifs restent subordonnés à l’unité d’action.
Greuze soigne la lisibilité du spectateur par l’ordonnance de la composition, l’expression des attitudes et des visages. L’artiste hausse ainsi son art à une certaine dignité, tel la « Grande Manière ».
Par la même il invente un nouveau type de sujet, touchant la bourgeoisie et la noblesse. Les héros de Greuze sont ceux d’une morale quotidienne, populaire et sentimentale ; une « morale de la peinture ». Diderot explique son enthousiasme envers Greuze car celui-ci est le premier en France à conférer à l’art « des mœurs », c'est-à-dire à la moralité mais aussi au concept plus neutre de « tableau des mœurs », tel le genre des peintres hollandais.
Diderot jugea que les scènes morales de Greuze étaient des tableaux au même titre que les œuvres de Poussin, Van Loo ou Le Brun (Essais sur la peinture, 1765).
Cependant, quand le peintre traite un véritable sujet d’histoire, avec Septime Sévère reproche à Caracalla d’avoir voulu l’assassiner (1769), on lui reproche de sortir de son genre.



Un témoin privilégié de son temps.
Salon de 1763, Diderot : « D’abord le genre me plait ; c’est de la peinture morale. Quoi donc ! Le pinceau n’a-t-il pas été assez et trop longtemps consacré à la débauche et au vice ? Ne devons-nous pas être satisfait de la voir concourir enfin avec la poésie dramatique à nous toucher, à nous instruire, à nous corriger et nous inciter à la vertu ? ».
Cette citation est révélatrice de la pensée du temps de Greuze, et de la demande d’une peinture morale. En effet, la décadence des mœurs d’une société galante est associée à une peinture brillante mais artificielle, le raffinement s’opérant dans l’oubli de la nature et donc à une corruption morale.
Dans ce contexte, l’art de Greuze répond à une attente car il s’appuie sur l’observation de la nature et s’oppose ainsi aux frivolités du rococo. Le ton sérieux et moralisateur plait alors à ceux qui prônent la restauration du « Grand Goût ».
Greuze est un acteur et témoin privilégié d’une époque particulièrement mouvante, marquée par des bouleversements sociaux et de mentalités. Il en est le représentant de par ses contradictions, entre libertinage et morale, se cherchant de nouvelles valeurs.


Le milieu du XVIIIè siècle voit naître une littérature sentimentale que l’art chercha à imiter. Sont alors privilégiés le sujet, les intentions et les suggestions sentimentales qui plurent au public.
Greuze pénétra ainsi au centre des mentalités, répondant à une attente et en provoquant l’empathie du spectateur.


BIBLIOGRAPHIE 

* BAILEY (C. B.), Jean-Baptiste Greuze, The Laundress, Los Angeles 2000.
* BARKER (Emma), Greuze and the Painting of Sentiment, PRESS SYNDICATE OF THE UNIVERSITY OF CAMBRIDGE, The Pitt Building, Trumpington Street, Cambridge, 2005.
* DIDEROT (Denis), Essais sur la peinture, Salons de 1759, 1761, 1763, Hermann, Paris, 2007.
* DIDEROT (Denis), Salons, Coll. Folio classique, Ed. Gallimard, Paris, 2008, p.61 – 66, p.90, p.222.
* MUNHALL (Edgar), Jean-Baptiste Greuze 1728-1805, catalogue de l’exposition organisée par le Wadsworth Atheneum, Hartford, 1977
* REX (Walter), « Diderot contre Greuze », Diderot’s counterpoints : the dynamics of contrariety in his major works, Oxford, 1998.


Ange-Jacques Gabriel, Petit Trianon, Versailles, 1762-1764

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Les maisons de plaisance royales sous Louis XV :
Ange-Jacques Gabriel, Petit Trianon, Versailles, 1762-1764.



Ange-Jacques Gabriel (1698 – 1782) succède à son père en 174, au poste de Premier Architecte du Roi. Ses œuvres majeures furent l’Opéra et les ailes qui flanquent le château de Versailles, les deux palais de la place de le Concorde ou encore les agrandissements du château de Compiègne.
Louis XV, dans les premiers temps de son règne délaisse Trianon. Mais dès 1750, il lui donne une nouvelle vie en faisant aménager un jardin expérimental et un nouvel appartement afin de pouvoir travailler au milieu de ses fleurs et de ses serres chaudes. Il fait en effet construire le Pavillon Français (« salon de compagnie »), le Pavillon Frais (« salon frais ») et la Nouvelle Ménagerie (ferme aujourd’hui disparue où étaient sélectionnées différentes espèces d’animaux domestiques).
En 1763, le Roi demande à Gabriel d’y édifier un nouveau pavillon qui soit assez vaste pour lui permettre d’y séjourner : Le Petit Trianon.
Ce dernier est alors édifié de 1762 à 1768, dans ce coin reculé du domaine, à l’initiative de Madame de Pompadour et de son frère, le marquis de Marigny.

Quelles spécificités apporte Gabriel au plan du Petit Trianon ?






« Désennuyer le Roi » (Madame de Pompadour). Enfant, Louis XV disait : « J’aime tant Trianon », il s’agissait alors du Grand Trianon, mais jusque dans les années 1750, le Roi délaisse cette partie du domaine (au Nord-Ouest du château).
C’est grâce à celle qui fut sa favorite, et bien qu’elle ne le fut plus, demeura son amie, Madame de Pompadour s’il y retourne, aimant se promener à ses côtés dans le jardin botanique ou les serres, que le fameux savant Bernard de Jussieu vient d’installer. Le Roi y classe ses herbiers (dans le Pavillon Français) ou y prend une collation (dans le Pavillon Frais destiné à déguster les produits de la Ménagerie et du jardin potager entourant le Pavillon Français, aujourd’hui jardin d’agrément).
Le Roi s’offre en effet de nouveaux lieux de plaisirs, avec l’extension de Trianon, répondant à son intérêt pour la zoologie et surtout la botanique.
La création d’un véritable petit château de plaisance où le Roi pourrait séjourner avec quelques privilégiés est la destination du Petit Trianon, initialement appelé « nouveau Trianon ».
Il s’agit alors d’un lieu de refuge à l’écart de la vie de Versailles, où se trouve la cour depuis 1682.
Gabriel propose un premier projet en 1761 mais celui-ci n’est pas retenu. Il en propose un second l’année suivante en reprenant l’ensemble des éléments du premier projet, mais en les simplifiant et en les magnifiant. Ainsi, par exemple, la façade passe de trois à cinq travées, permettant une distribution plus large et une hiérarchie des espaces plus marqués.
Les travaux du Pavillon du Roy, tel qu’il est nommé, débutent en 1762. Le gros œuvre de la construction s’élève de 1763 à 1764 et l’édifice est couvert en 1764. Quant à l’intérieur, pour la sculpture, la menuiserie, la serrurerie et la peinture, le travail se poursuite de 1765 à 1768.
Ainsi, Madame de Pompadour, qui argumenta en faveur de la construction d’une demeure à Trianon, ne le vit jamais terminé, décédant en 1764. Le pavillon ne sera, réellement inauguré que cinq ans plus tard en 1769, par le Roi Louis XV et la comtesse du Barry, nouvelle favorite.
Pour ce chef d’œuvre innovant, Gabriel s’entoure d’une équipe nouvelle, et notamment du sculpteur Honoré Guibert.
120 maçons et 75 tailleurs de pierre travaillèrent sur le projet. Notons que la pierre utilisée pour les chapiteaux de la façade est la pierre de Conflans, venant de Port Marly.
D’Argenville, Guide des environs de Paris, TII, 1768 : « Vis-à-vis le pavillon (l’actuel Pavillon Français) il s’en élève un neuf qui occupe un carré d’environ douze toises (environs 23m), composé d’un rez-de-chaussée et de deux étages, lesquels sont compris dans un ordre corinthien surmonté d’une balustrade. Chaque face a cinq croisées. Celle du Jardin est ornée d’un avant corps formé de quatre colonnes isolées. Les deux côtés sur le jardin fleuriste et sur la cour sont décorés de pilastres ».

Une maison de plaisance royale : hiérarchisation et fonction des espaces.

La simplicité de la façade n’est qu’apparente car chaque façade est différente, traitée en fonction de l’espace qu’elle regarde : la cour, le jardin français (avec son pavillon, côté ouest, la principale et plus riche avec ses quatre colonnes corinthiennes qui rythment le ressaut central), le jardin botanique (d’une composition plus simple, de cinq travées, donnant sur l’actuel jardin anglais) et le jardin fleuriste.
Elevé sur un sous-sol partiel voûté, le bâtiment comporte trois niveaux principaux et un niveau d’entresol.
Le pavillon est surélevé par un perron, formant terrasse sur les façades Nord et Ouest pour les pièces de l’étage noble. Les façades Est et Sud, quant à elles permettent l’accès de plain-pied aux pièces du rez-de-chaussée.
Les pièces de réceptions se trouvent sur la façade Ouest, façade principale (potager ou jardin Français). Les pièces plus intimes se situaient entresolées à l’Est avec un escalier particulier ; pour l’usage privé du Roi. Quant aux pièces de commodités, elles se trouvent en second jour, au centre du pavillon.
Le plan reprend le même principe tripartite que les trois façades.
Organisé autour d’un vestibule central et son escalier d’honneur, le rez-de-chaussée comportait une salle de billard, une salle de gardes, un réchauffoir et différentes pièces à l’usage du service. Celui-ci donnait de plain-pied sur la cour et était essentiellement dédié au service.
L’escalier à large rampe en fer forgé et doré (par H. Guilbert et F. Brochois, en 1765) permet d’accéder à l’étage noble où se trouvent les pièces de réception. Il est le principal ornement du vestibule et assure la desserte du premier étage, lui assurant une plus grande ampleur, alors que deux escaliers particuliers assurent les liaisons privatives et de service. Les « L » entrelacés de Louis XV ont par la suite été remplacés par le chiffre de Marie-Antoinette, « MA ».
L’étage noble rassemble les différents espaces de réception et certaines pièces plus intimes, aux décors plus raffinés.
Il comporte une antichambre, où se trouvaient autrefois deux poêles en faïence, placés de part et d’autre de la porte donnant accès à la salle à manger et chauffaient ainsi les deux pièces.
Le décor de la grande salle à manger, rappelle sa destination avec les sculptures des boiseries et la cheminée, représentant des fruits. De même, quatre tableaux énoncent les différentes sources de l’alimentation : La Moisson (de Lagrenée), La Chasse (de Vin), La Vendange (de Hallé) et La Pêche (de Doyen).
Louis XV avait commandé au mécanicien Loriot, des « tables volantes » qui devaient monter du rez-de-chaussée, par des ouvertures prévues dans les planchers de la grande et de la petite salle à manger. Elles ne furent jamais exécutées, cependant les massifs de maçonnerie prévus par Gabriel pour recevoir le système de contrepoids, subsistent encore aujourd’hui dans les caves. Le 16 mars 1772, le marquis de Marigny écrit à Loriot : « Les circonstances paraissent, Monsieur, ne pas permettre de longtemps l’exécution des deux tables mécaniques que vous avez inventées pour le nouveau Trianon ».
La petite salle, initialement appelée « salle à manger des seigneurs », fut transformée en salle de billard par la suite, sous Marie-Antoinette.
Dans le salon de compagnie, les boiseries, sculptées par Guibert sont sans doute les plus belles du château. On y trouve également des peintures en dessus de porte, des peintures tirée des Métamorphoses d’Ovide.
Les salles suivantes sont entresolées et orientées vers l’Est, sur le jardin botanique et donc réservé à l’espace du Roi.
On y trouve aujourd’hui un cabinet de toilette qui fut anciennement la bibliothèque botanique de Louis XV.
La chambre de Marie-Antoinette est quant à elle l’ancien cabinet du Roi, dont les appartements se trouvaient à l’étage du dessus.
La salle que l’on connait aujourd’hui sous le nom de cabinet « des glaces mouvantes » (glaces qui obstruent les fenêtres par un ingénieux système venant du rez-de-chaussée), ou boudoir était à l’origine un escalier servant à Louis XV pour monter directement dans sa chambre à l’attique, et au pied duquel le Roi prenait son café.
Le second étage, ou attique, regroupe trois pièces principales, formant l’appartement du Roi. Ce-dernier comporte une antichambre, la chambre à coucher du Roi et un cabinet (dès 1766 nommé « pièce où est le café du Roy ») ; ainsi que cinq autres appartements dits « des seigneurs », desservis par un escalier de service. Ils sont habités par les familiers du Roi, et c’est l’un de ces logements qu’occupera dans un premier temps la comtesse du Barry de 1770 à 1772.
L’élévation se fait sur trois travées égales, chacune surmontées en comble, d’une charpente indépendante.
Notons l’exigüité du pavillon, et la hiérarchie des appartements et des escaliers, entre pièces de service, de réceptions, pour l’usage des seigneurs et pour l’usage du Roi.

L’annonce du néoclassicisme.
Le Petit Trianon annonce le style néoclassique. En effet, afin de plaire à la marquise de Pompadour, toujours à la pointe de la mode, Gabriel rompit avec l’esthétique rocaille pour adopter un édifice cubique avec des lignes pures, conforme au nouveau style en vogue, dit « à la grecque ».
En architecture, le néoclassicisme est la conjugaison d’une idée de « noble simplicité » avec celui d’une utilisation rationnelle des formes classiques. La référence constante est donc le temple grec, alliant noblesse, simplicité et logique (théorie de Winckelmann, « noble simplicité et grandeur sereine »).
Le Petit Trianon, par sa sobriété, la richesse raisonnée de l’ornement, l’ordre et la perfection caractérisent cette nouvelle manière de bâtir. On voit également une rupture avec le style rocaille que l’on retrouve à l’intérieur de l’édifice, notamment avec les boiseries.
Le décor sobre donne également une idée juste de la recherche du bonheur propre au XVIIIe siècle.
L’édifice allie la dignité du style palladien et le raffinement français. Gabriel représente le courant conservateur du classicisme français et se distingue de ses cadets « révolutionnaires », comme Ledoux ou Boullée.


Le style de Gabriel s’éloigne de celui de Jules Hardouin-Mansart et s’associe à une idée de palladianisme mais les modalités en restent profondément françaises.
Il s’agit également de la seule œuvre de Gabriel dans laquelle on peut déceler un germe de conception anglaise même si la réalisation est en définitive totalement française.
On a donc une architecture nationale du retour à l’Antique, parfaitement illustrée ici par Gabriel. Le Petit Trianon allie en effet, les qualités de noblesse et de mesure, d’équilibre et d’évidence.
Dans sa nouveauté, Trianon se ressent surtout d’un classicisme français hérité de Louis XIV dont il conserve la force et la noblesse, augmenté de l’élégance du XVIIIe siècle.



BIBLIOGRAPHIE : * DUSSIEUX (Louis), Le château de Versailles, Versailles, 1881.

* DESJARDIN (Gustave), Le Petit Trianon, histoire et description, L. Bernard, Versailles, 1885.

* GALLET (Michel) et BOTTINEAU (Yves), Les Gabriel, article « Le nouveau Trianon », par Christian Baulez, Conservateur en chef, Ed. Picard, 1982/2004.


mercredi 20 mai 2009

Le testament de Louis XVI retrouvé !

L'information est tombée ce mercredi : le testament politique de Louis XVI a été retrouvé par un français féru de manuscrits anciens...aux Etats Unis !


Texte tiré de : http://www.lefigaro.fr/




Avant de fuir en juin 1791, le roi de France avait rédigé un texte pour se justifier. Le manuscrit, qui avait disparu, a été découvert aux États-Unis.

Il avait disparu depuis la Révolution française. Il se cachait dans une collection américaine où il vient d'être acquis par un Français, collectionneur de manuscrits anciens. Le testament politique de Louis XVI est une œuvre politique majeure, datant de la fuite à Varennes, dans la nuit du 20 juin au 21 juin 1791. Avant de partir, Louis XVI a probablement quelques scrupules. Il pense enfin pouvoir échapper à l'Assemblée constituante mais il ne veut pas quitter Paris sans laisser un document expliquant les raisons de sa fuite. Il entend s'adresser à son peuple. Aussi rédige-t-il cette Déclaration à tous les Français, un manuscrit de seize pages in quarto, qui deviendra, selon la tradition historique, son «testament politique» (à ne pas confondre avec le testament qu'il rédigera dans la prison du Temple avant de monter sur l'échafaud et qui est plus personnel et moral). Le roi demandera à La Porte, son intendant, de déposer le lendemain de sa fuite cette Déclaration sur le bureau du président de l'Assemblée, qui est alors Alexandre de Beauharnais. L'histoire se télescope : celui qui recueille le testament du dernier roi de l'Ancien Régime n'est autre que le premier époux de Joséphine, la future impératrice des Français ! Le monde est petit.


Dans ce texte long et parfois assez mal structuré, Louis XVI entend exprimer sa conception politique la plus profonde. Au moment de le rédiger, il se sent libéré des contraintes, des faux-semblants et des réserves qu'il a toujours dû s'imposer depuis le début de la Révolution. Il déclare même, au moment de partir, qu'«une fois le cul sur la selle, il serait tout autre». Se voyant déjà loin de Paris et de l'Assemblée, il livre sa véritable conception des événements révolutionnaires, depuis la réunion des États généraux, et exprime son idéal politique, une monarchie constitutionnelle avec un monarque puissant.
C'est donc un texte d'une portée considérable. Dans sa biographie de Louis XVI, Jean-Christian Petitfils, insiste à juste titre sur son caractère essentiel pour bien comprendre l'évolution de la pensée du monarque : «La plupart des historiens, écrit Petitfils à propos de la déclaration royale, ne lui ont pas donné l'importance qu'elle mérite. Ils l'ont soit négligée, soit hâtivement lue et commentée». Son contenu n'était en effet pas ignoré des savants, dans la mesure où le texte a été reproduit dans de
nombreux documents parlementaires, notamment les Archives parlementaires (publiées sous le Second Empire), mais l'original avait disparu. C'est lui qui
vient enfin d'être retrouvé. Il ne fait aucun doute qu'il s'agit du document authentique. Son acquéreur, Gérard Lhéritier, président de la société Aristophil, une société qui achète des manuscrits anciens et propose ensuite à des collectionneurs de devenir en partie propriétaires de ces documents (tout en les conservant dans son Musée des lettres et manuscrits), insiste sur son caractère unique. «C'est une pièce exceptionnelle, vibrante d'histoire, que nos experts ont pu retrouver aux États-Unis.» Cette certitude est confirmée par des spécialistes de grand renom, comme Thierry Bodin, expert en autographes près la cour d'appel de Paris. Pour ce dernier, la paternité du document est évidente. «C'est la signature du roi et, surtout, il a été paraphé et signé par le président de l'Assemblée nationale, Alexandre de Beauharnais.» D'autant que la prise de Gérard Lhéritier est double. Il y a non seulement le document en lui-même mais un autre manuscrit de huit pages rédigées par le propre frère de Louis XVI, le comte de Provence, futur Louis XVIII. Ce texte avait été demandé par le roi à son frère peu de temps avant son départ, afin que celui-ci retrace les injustices subies par la famille royale depuis 1789. C'était une manière d'impliquer le comte de Provence dans le projet de fuite et le contraindre, par la même occasion, de quitter Paris le même jour (le roi craignait que son frère, qui n'avait pas toujours été tendre avec le couple royal, ne cherche à profiter de son départ pour se hisser sur le trône). Jugées trop agressives à l'égard de l'Assemblée, les remarques du comte de Provence ne furent pas toutes reprises par Louis XVI, qui commentera puis écartera ces huit pages.



Pièce à charge lors du procès du roi
Comment un tel trésor a-t-il pu s'évanouir dans la nature ? La plupart des historiens et des spécialistes avouent leur ignorance sur les circonstances de la disparition de ces documents capitaux. C'est un mystère digne du Da Vinci Code. Jean-Christian Petitfils rappelle que ce n'est pas le seul document officiel qui ait disparu sous la Révolution. Il suffit de songer, dans un autre registre, au vol des diamants de la Couronne. Selon Thierry Bodin, le document devait probablement avoir été conservé jusqu'au procès de Louis XVI qui s'ouvre en décembre 1792. «Il disparaît ensuite, sans laisser de trace.» Certains pensent qu'il aurait pu, au milieu du XIXe siècle, faire partie du fonds d'un collectionneur fameux, Étienne Charavay, mais il ne figure pas dans la vente des manuscrits de ce dernier. D'autres évoquent la possibilité qu'il ait été dans le fonds de Feuillet de Conches, autre collectionneur célèbre du XIXe siècle, qui a publié des Lettres et documents inédits de Louis XVI (1864-1873), mais où les documents les plus authentiques côtoient les faux les plus étonnants. Il faut se rendre à l'évidence : on ne sait pas comment le manuscrit a pu disparaître pour ensuite quitter le territoire. Son existence est signalée dans les années 1950, à l'occasion d'une vente Hennessy, mais le document original n'y figure pas. Puis on perd définitivement sa trace jusqu'à son acquisition aujourd'hui par la société Aristophil. Un mystère surprenant, alors même que ce texte a eu, dans la vie du monarque, un rôle on ne peut plus funeste.



Car la Déclaration fut en effet une des pièces à charge lors du procès du roi sous la Terreur. Ainsi, le rapport d'accusation, lu par Lindet le 10 décembre 1792, à la Convention, le cite précisément et l'utilise pour prouver la duplicité du roi et ses mauvaises intentions. «C'était sans doute le Manifeste destiné à plonger la France dans les horreurs de la guerre civile, écrit Lindet. (…) Son Manifeste du 20 juin atteste ses intentions hostiles ; il voulait le renversement de l'État, puisqu'il ne voulait ni les lois, ni la Constitution qu'il avait juré de maintenir». Indéniablement, cette Déclaration a contribué à poser Louis XVI en ennemi de la Révolution. Mais que dit précisément le texte ? En réalité, le roi est loin d'avoir rédigé un brûlot contre-révolutionnaire. Il ne se résout certes pas à l'abaissement de la monarchie. Il juge que les réformes de l'Assemblée et l'attitude des clubs, «calomniateurs et incendiaires», ont porté atteinte à «la dignité de la Couronne de France». Il s'en prend notamment au refus, par l'Assemblée, de lui accorder un droit de veto absolu (il n'est que «relatif»), au poids excessif des comités de la Constituante, notamment le Comité des recherches qui exerce, selon le roi, «un véritable despotisme plus barbare et plus insupportable qu'aucun de ceux dont l'histoire ait jamais fait mention».



Le monarque n'avait jamais été aussi conciliant
Le roi critique aussi l'excessive décentralisation, la suppression de son droit de grâce, etc. Mais, sur le plan social, il se rallie pourtant à la révolution juridique de l'été 1789 ; il ne rejette plus l'abolition des ordres, comme dans sa Déclaration du 23 juin 1789. Il admet l'égalité civile et insiste même sur les réformes qu'il avait cherché à faire, notamment en 1787, en matière fiscale, afin que les privilégiés ne bénéficient plus d'exemptions indues. Il conclut, sur le ton de l'époque : «Français, et vous surtout Parisiens (…), revenez à votre roi ; il sera toujours votre père, votre meilleur ami.»



La rédaction du texte lui a pris à peu près quatre ou cinq mois de réflexion. Il y a travaillé seul, à l'insu de ses ministres, et il n'y associera son frère qu'à la dernière minute, le samedi 18 juin, comme en témoigne ce dernier. On sait comment tout cela finira. Son arrestation à Varennes va, comme le rappelle Mona Ozouf, se révéler fatale pour la monarchie. La déclaration du roi se montrera bien incapable de lui sauver la mise. Bien au contraire. Le prestige de la monarchie sera pour jamais terni par cette équipée malheureuse. Pourtant, comme le remarque à juste titre Jean-Christian Petitfils, ce testament politique de Louis XVI prouve que le roi n'avait jamais été aussi conciliant. C'est ce triste paradoxe que met en évidence le document laissé à l'Assemblée : «Jamais Louis XVI n'avait été aussi proche de la Révolution qu'en fuyant la capitale. Sur la route de Varennes, il était devenu un souverain constitutionnel, à la recherche, hélas, d'une impossible Constitution». De toute cette histoire tragique, il ne reste plus aujourd'hui qu'un seul témoignage, ce manuscrit oublié.

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